Pourquoi réhabiliter plutôt que construire ?
Réduire les déchets et la consommation de matériaux
La construction de logements neufs produit plus de déchets et consomme plus de ressources que la rénovation d’édifices existants. Selon l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME), l’édification d’une maison individuelle nécessite près de 40 fois plus de matériaux qu’une rénovation, voire 80 fois plus, dans le cas d’un immeuble de logement collectif. L’urbaniste Sylvain Grisot ajoute dans l’essai « Réparons la ville ! » que construire un immeuble « produit 5 fois plus d’émission de gaz à effet de serre qu’une réhabilitation ».
Limiter les démolitions et les besoins en constructions neuves à travers la valorisation, la mutation et la rénovation du parc immobilier existant constitue donc un levier indispensable pour atteindre la neutralité carbone et pallier la raréfaction des ressources naturelles.
La réhabilitation : un choix économique opportun
Selon la Réglementation Environnementale 2020 du Cerema, la durée de vie conventionnelle d’un bâtiment est d’environ cinquante ans, voire davantage pour ses composants structurels. Détruire un édifice construit il y a trente ou quarante ans n’est donc pas judicieux sur le plan économique.
De la mise en valeur d’un patrimoine ou d’une qualité architecturale préexistante, à l’embellissement d’une construction présentant peu d’intérêt, en passant par son adaptation à de nouveaux usages, sa mise aux normes, ou encore, son extension… La réhabilitation immobilière peut être également créatrice de valeur.
Matériaux : cap sur le réemploi et le recyclage !
En quoi consiste le réemploi de matériaux ?
Le réemploi des matériaux de construction regroupe une série de pratiques visant à « réutiliser des matériaux ou éléments de construction issus de déconstructions pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus » comme le prévoit la directive européenne n°2008/98/CE du 19 novembre 2008 relative aux déchets. Pratique traditionnelle, le réemploi a pratiquement disparu dans le sillage du développement de l'industrie du bâtiment. Elle fait aujourd’hui un retour en force, à l’heure où l’économie circulaire est encouragée pour limiter la production de déchets et la raréfaction des ressources naturelles.
Preuve de l’intérêt qu’il suscite, un nombre croissant d'appels d'offres publics et privés de chantiers de réhabilitation, de démolition ou d'aménagement contiennent désormais des clauses relatives au réemploi des matériaux de construction. Outre ses vertus écologiques, cette pratique présente également des avantages économiques :
La récupération de matériaux permet de réduire le volume de déchets produits sur les chantiers et les trajets de transport pour la mise en décharge ;
La diminution du nombre de matériaux à acquérir et/ou l’achat de matériaux d’occasion ont un impact positif sur le coût final d’un projet ;
Les maîtres d’ouvrage et sociétés de construction peuvent tirer des bénéfices de la revente de matériaux aux entreprises de la filière du réemploi.
Favoriser le recyclage des matériaux de construction
Le recyclage permet la réutilisation de la matière première contenue dans un déchet afin de fabriquer un nouvel objet. Depuis 2008 et la directive relative aux déchets, l’Union Européenne fixe l’objectif de recyclage des déchets de construction et de démolition à 70 %.
Ces déchets disposent en effet d’un fort potentiel. Une fois traités et recyclés, ils peuvent être réintroduits dans le cycle de production pour devenir de nouveaux éléments de construction. Cette stratégie permet de réduire la consommation de matières premières et le volume de déchets produits.
Une grande variété de matériaux peuvent être recyclés, à l’image de :
L’acier contenu dans les barres d’armature pour le béton armé, les fils, les clous et certains éléments métalliques. Il peut être transformé à l’infini, sans perdre en qualité.
Le béton durci qui, une fois concassé, produit des granulats utilisés pour concevoir des éléments structurels ou du sous-plancher.
Le bois qui peut servir à fabriquer des lattes de caisses et de palettes, des boiseries, des panneaux, ou produire de la biomasse pour les fours industriels.
Le polystyrène expansé utilisé dans la fabrication de nouveaux produits en plastique ou dans certaines finitions et peintures.
Le verre qui peut être brisé et mélangé à du béton pour concevoir des sols et des comptoirs en granit.
L’architecte en première ligne du recyclage des bâtiments et des matériaux
L’architecte du XXIe siècle dispose d’un rôle central pour promouvoir et appliquer ces pratiques et aider le secteur de la construction à mener sa transition écologique.
Restructurer et réinventer un édifice en tenant compte des contraintes existantes, mettre en valeur et prolonger l’esprit d’un lieu, ou encore, l’adapter aux usages actuels mettent au défi son agilité et son inventivité, comme l’affirme l’architecte Antoine Renaud, Associé de l’agence d’architecture Morris & Renaud : « à l’opposé du standard ou du duplicable qui normalisent trop souvent les projets et les environnements. L’intervention sur un état préexistant constitue un potentiel de créativité qui n’a rien à envier à la conception de bâtiments neufs ».
[1] Chiffres Union Européenne : https://environment.ec.europa.eu/topics/waste-and-recycling/construction-and-demolition-waste_en